1.      Introduction générale

La détermination des coordonnées et de diverses caractéristiques de points dans l’espace occupe une place importante dans la plupart des études à buts environnementaux. L’objectif de ces déterminations est généralement l’étude de l’aspect géographique des inter-relations entre les divers paramètres ou indicateurs relevés.

L’objet de ce cours est de balayer l’ensemble des méthodes et techniques à la disposition des bureaux d’études pour acquérir des informations à la fois géométriques et thématiques sur des objets tri-dimensionnels, qui composent nos paysages urbains et naturels. Il ne s’agit évidemment pas de former des topographes chevronnés, mais bien de donner une culture technique de base pour permettre d’une part un dialogue avec les professionnels et d’autre part, lorsque c’est nécessaire, la mise en œuvre de protocoles de mesures simples.

Dans une première partie, nous rappellerons les notions géodésiques de base nécessaire à la compréhension de ce cours. Nous nous intéresserons ensuite aux méthodes de détermination directes de la topométrie classique : le nivellement direct et indirect, la triangulation et ses déclinaisons. Nous évoquerons rapidement les notions de précision et d’erreur de mesure. Enfin, nous présenterons les grandes caractéristiques du système GPS, ses capacités et ses modes d’exploitation. Nous terminerons par un aperçu rapide des méthodes de télédétection pour la génération de plans d’information géographique.

1.1.  Une carte, un plan pour quoi?

La première question que doit se poser le cartographe ou le topographe est la suivante : quelles sont les informations que l’on souhaite obtenir du terrain ? Ceci doit permettre de définir le plus petit objet qui devra être visible sur la carte ou le plan, conditionnant ainsi l’échelle du document. On en détermine ainsi la teneur en information. Quelques exemples pour illustrer ces propos : nous partirons du principe que le plus petit détail aisément discernable, ainsi que la précision de report manuel, ne peuvent être inférieurs au dixième de millimètre. Ainsi, nous obtenons les relations suivantes entre les échelles classiques des documents et le type de détails représentés :

·         Plan de maison ® 1/50

·         Plan de corps de rue (murs, égouts, trottoirs…) ® 1/200 à 1/500

·         Plan de lotissement, d’occupation des sols, cadastre ® 1/1000 à 1/2000

L’échelle 1/mb d’un document est souvent qualifiée de deux façons différentes et contradictoires : l’une qualifie le coefficient d’échelle mb, et l’autre, le rapport d’échelle. Dans la suite, on se limitera à la seconde qui a le plus souvent cours dans les administrations et les fournisseurs de données.

1.2.  Un panel de techniques et méthodes

Afin de décrire le terrain, on dispose de tout un panel de techniques et méthodes qu’il s’agit maintenant d’étudier, dans les grandes lignes. Le propos est, comme précisé plus haut d’en connaître les principes, le moyen de les mettre en œuvre efficacement pour des travaux restreints, de savoir quand faire appel à un professionnel et d’avoir avec lui un langage commun. Nous verrons comment choisir l’appareil et la technique adaptés au problème qui se pose, aux contraintes de précision de l’étude.


2.      Notions géodésiques de base

Sans entrer excessivement dans les détails, nous rappelons ici les grandes notions de géodésie sur les systèmes, les surfaces de référence, les grandes familles de projection cartographique…

2.1.  Quelques définitions

Les définitions qui suivent sont principalement tirées et inspirées de la notice technique de l’Institut Géographique National, intitulée : Notions géodésiques nécessaires au positionnement géographique (IGN, 2000).

2.1.1.   Les paramètres essentiels

La mise en œuvre de la géodésie et des techniques qui en sont dérivées nécessitent l’existence d’un jeu de paramètres essentiels :

·         un système géodésique de référence

·         un réseau géodésique de points matérialisés

2.1.1.1.                       Le système géodésique

Un système géodésique (ou datum géodésique) est un repère affine possédant les caractéristiques suivantes :

·         le centre O est proche du centre des masses de la Terre

·         l’axe OZ est proche de l’axe de rotation terrestre

·         le plan OXZ est proche du plan méridien origine

Les coordonnées géodésiques du point M ne sont pas des valeurs objectives mais bien dépendantes d’un modèle théorique. Un point de la croûte terrestre est considéré fixe par rapport au système géodésique, malgré les petits déplacements qu’il peut subir (marée terrestre, surcharge océanique, mouvements tectoniques). Ainsi, il apparaît la nécessité de disposer d’une surface de référence : l’ellipsoïde.

2.1.1.2.                       Le réseau géodésique

Un réseau géodésique est un ensemble de points de la coûte terrestre (tels que des piliers, des bornes…) dont les coordonnées sont définies, estimées par rapport à un système géodésique. Plusieurs types de réseaux sont distingués :

·         les réseaux planimétriques

·         les réseaux de nivellement

·         les réseaux tridimensionnels géocentriques

Pour résumer :

Avec le réseau, une réalisation géodésique nécessite donc la mise en oeuvre d’un système géodésique qui peut être résumé par l’ensemble des constantes et algorithmes qui doivent intervenir dans le processus d’estimation des coordonnées. (IGN, 2000)


2.1.2.   Les surfaces

Plusieurs surfaces sont à considérer lorsque l’on s’intéresse au positionnement géodésique.

La première est bien évidemment la surface topographique. C’est elle qui joue le rôle d’interface entre partie solide et partie liquide ou gazeuse de la Terre. C’est elle que nous connaissons le mieux, d’un point de vue sensoriel et physique, elle est l’objet de nombreuses sciences et techniques.

Le géoïde est la seconde surface à considérer. Elle se définit comme la surface équipotentielle du champ de pesanteur. L’accélération de pesanteur (g) lui est donc normale en tout point. Une excellente réalisation physique de cette équipotentielle est la surface moyenne des mers et océans. Mais sous les continents, l’accès à cette surface ne peut être qu’indirect. On retiendra donc la réalité physique indéniable de cette surface tout en gardant à l’esprit les difficultés que nécessite sa détermination.

Enfin, l’ellipsoïde de révolution représente la dernière surface. Modèle mathématique défini pour faciliter les calculs et pour qu’il soit le plus près possible du géoïde, il peut être local ou global, selon le champ d’application souhaité du système géodésique auquel il est associé (couverture mondiale ou d’un territoire seulement).

2.1.3.   Différents types de coordonnées

Les coordonnées d’un point peuvent être exprimées de différentes façons :

·         Géographiques : latitude et longitude (valeurs angulaires)

·         Cartésiennes : exprimées dans un référentiel géocentrique (valeurs métriques)

·         En projection : représentation cartographique plane (valeurs métriques)

Généralement, les coordonnées géocentriques ne servent que d’étape de calcul pour les changements de système géodésique.

Pour résumer :

Plusieurs surfaces sont accessibles au topographe pour déterminer les coordonnées d’un point, qui peuvent être exprimées de façon différentes selon le type d’application. Le lien entre le type de coordonnées et la surface de référence est primordial. Connaître ces deux éléments constitue une obligation pour exploiter la localisation des points.

2.2.  Le changement de système géodésique

Le problème est suffisamment courant pour mériter qu’on lui attache un peu d’importance. Même si la quasi totalité des logiciels de SIG, de traitement d’images ou d’import de données GPS sont capables d’effectuer des transformations de système, il semble utile d’en préciser les principes et les méthodes.

Au paragraphe précédent, nous évoquions la notion de champ d’application du système géodésique. Celle-ci prend une grande importance lorsqu’il s’agit de changer de système géodésique. En effet, selon les natures des systèmes de départ et d’arrivée, les méthodes employées diffèrent.

De façon générale, le processus de changement de système de coordonnées peut être représenté par la figure suivante :

Figure 1. Le changement de système géodésique

La plus utilisée est la similitude 3D car elle présente l’avantage de pouvoir être appliquée "dans les 2 sens" avec les mêmes relations. Par contre, le passage inverse nécessite, pour les formules de Molodensky  et les transformations polynomiales, des formules différentes.

Les formules de Molodensky sont des développements limités dont l’ordre influe évidemment sur la précision finale. La transformation polynomiale ne s’applique que sur des zones restreintes (pour conserver une précision comparable à celle par l’emploi d’une similitude).

2.3.  Les projections planes

L’objectif des projections cartographiques est d’obtenir une représentation plane du modèle ellipsoïdal de la surface de la Terre. L’intérêt majeur réside alors dans les valeurs métriques, beaucoup plus facilement exploitables, en particulier pour les mesures de distance.

Mais une projection ne peut jamais se faire sans qu’il y ait de déformations. Pour s’en convaincre, il suffit d’essayer d’aplatir la peau d’une orange ! Néanmoins, par calcul, il est possible de définir le type et les paramètres d’une projection dans le but de minimiser certaines déformations. On choisit alors :

·         soit de conserver les surfaces (projections équivalentes)

·         soit de conserver localement les angles (projections conformes)

·         soit de conserver les distances à partir d’un point donné (projections équidistantes)

·         soit d’opter pour une représentation ne conservant ni les angles ni les surfaces (projections dites aphylactiques).

Dans tous les cas, aucune projection ne peut conserver toutes les distances. On introduit alors les notions de module linéaire et d’altération linéaire. Aujourd’hui, la plupart des projections utilisées en géodésie et topographie sont conformes. La cartographie à petite échelle utilise souvent des projections équivalentes.

Une autre façon de classer les projections planes est de s’intéresser à leur canevas, c’est-à-dire l’image des méridiens et des parallèles. C’est selon cette approche que nous allons aborder les grandes familles de projection.


2.3.1.   Projections coniques

Dans ce type de représentation, les images des méridiens sont des demi-droites qui concourent en un point image du pôle et les parallèles des arcs de cercles concentriques autour de ce point. Elles peuvent être réalisées de deux façons :

Tangente

Sécante

Figure 2. Les projections coniques

 

Figure 3. Projection conique conforme de Lambert

 

Figure 4. Projection conique équidistante
Figure 5. Projection conique équivalente d’Albers

 

 

 

Figure 6. Comparaison des projections coniques conforme de Lambert et équivalente d’Albers

2.3.2.   Projections cylindriques

Dans ce type de représentation, l’image des méridiens est un faisceau de droites parallèles, et l’image des parallèles, un faisceau de droite parallèles, orthogonales à l’image des méridiens. Elles peuvent réalisées de trois façons :

 

Directe

Oblique

Transverse

Figure 7. Les projections cylindriques

Figure 8. Projection conforme cylindrique directe de Mercator

Figure 9. Projection conforme cylindrique transverse de Mercator (UTM)

Figure 10. Projection cylindrique transverse équidistante

2.3.3.   Projections azimutales

Dans ce type de représentation, les images des méridiens sont des demi-droites qui concourent en un point image du pôle. Les parallèles sont des cercles entiers concentriques autour de ce point.

 

Figure 11. Projection azimutale équivalente de Lambert

Figure 12. Projection azimutale équidistante

2.3.4.   Autres projections

Il existe encore d’autres types de projection mais leurs utilisations en cartographie sont beaucoup plus spécifiques, voire difficiles, que celles des trois grandes familles qui viennent d’être exposées. C’est pourquoi nous ne nous attarderons pas dessus.

2.4.  Paramètres de projection

Avant de projeter des données géolocalisées, il importe de connaître les paramètres du datum dans lequel elles sont exprimées, pour éventuellement procéder à un changement de système.

 

Système
géodésique

Ellipsoïde
associé

a

b

1/f

e

NTF

Clarke 1880 IGN

6378249.2

6356515.0

293.466021

0.08248325676

ED50

Hayford 1909

6378388.0

6356911.9461

297.000000

0.08199188998

WGS84

IAG GRS 1980

6378137.0

6356752.314

298.257222

0.08181919106

Tableau 1. Datums, ellipsoïdes et paramètres associés (IGN)


 

Zone Lambert

I

II

III

IV

II étendu

Zone application

53.5gr - 57gr

50.5gr - 53.5gr

47gr - 50.5gr

Corse

France entière

Latitude origine

55gr = 49°30´

52gr = 46°48´

49gr = 44°06´

46.85gr = 42°09´54"

52gr = 46°48´

Longitude origine

0gr Paris

0gr Paris

0gr Paris

0gr Paris

0gr Paris

Parallèles
automécoïques

48°35´54.682"
50°23´45.282"

45°53´56.108"
47°41´45.652"

43°11´57.449"
44°59´45.938"

41°33´37.396"
42°46´03.588"

45°53´56.108"
47°41´45.652"

X0 : False Easting

600 000 m

600 000 m

600 000 m

234.358 m

600 000 m

Y0 : False Northing

200 000 m

200 000 m

200 000 m

185 861.369 m

2 200 000 m

Tableau 2. Projections Lambert associées au datum NTF (IGN)

 

Référentiel géodésique

RGF93

Ellipsoïde associé

IAG GRS80

X0 (False Easting)

700 000 m

Y0 (False Northing)

6 600 000 m

Latitude origine

46°30´ N

Longitude origine

3° Est Greenwich

Parallèles automécoïques

44° N et 49° N

Tableau 3. Projection Lambert 93 associée au datum RGF 93